Les élus du Conseil départemental, appuyés par la présidente Chaynesse Khirouni, sont mobilisés pour un développement plus juste et plus concerté du territoire transfrontalier entre la France et le Luxembourg.
À l’occasion de la session publique du lundi 23 juin 2025, le vice-président délégué au Transfrontalier et à la Coopération décentralisée, Vincent Hamen, ainsi que les conseillers départementaux Serge de Carli, André Corzani et Bruno Trombini, ont interpellé Françoise Souliman, Préfète de Meurthe-et-Moselle, sur les difficultés rencontrées par les habitants de leurs cantons « et plus précisément dans les communes de la bande frontalière avec le Luxembourg. »
« Nous assistons à une douloureuse dégradation généralisée des conditions de vie de nos habitants que personne ne peut désormais ignorer, y compris l’État, dont la mission première est d’assurer, à tous les citoyens, l’égalité en droits et en devoirs, ceci quel que soit l’endroit où ils résident », a rappelé Serge de Carli. Quelques exemples : à Mont-Saint-Martin, 10 % des élèves de niveau primaire ont quitté les écoles françaises pour intégrer le système scolaire luxembourgeois qui pratique la gratuité totale, des cantines au périscolaire, avec l’assurance d’un apprentissage trilingue. Par ailleurs, le désert médical s’aggrave. Les maires sont encouragés à recruter des généralistes. Les urgences sont sous tension constante. L’accès aux soins de proximité devient un luxe. Médecins, infirmières, spécialistes, formés en France, sont nombreux à franchir la frontière. Autres phénomènes : le trafic de drogues qui se développe, ainsi que les incivilités, notamment routières ou encore la multiplication des stationnements illicites de gens du voyage, qui provoquent incompréhension et colère citoyennes.
Le service public fragilisé par les difficultés de recrutement, le coût du logement, la pression foncière, les écarts salariaux avec le Luxembourg sont autant d’éléments convergents qui fragilisent les territoires et participent à les vider de leurs forces vives.
« Face à cette situation injuste qui s’intensifie, nous déplorons l’attitude de l’État dont la réaction n’est pas à la hauteur des enjeux auxquels font face, dans leur vie quotidienne, les femmes et les hommes du Pays-Haut », ont estimé les élus. « La tension immobilière devient un obstacle majeur », a ajouté Bruno Trombini, délégué territorial de Longwy. Face à la hausse des loyers et à la concurrence avec le marché luxembourgeois, de fortes inégalités territoriales dans l’accès aux services publics aggravent les difficultés dans les domaines de la santé, de l’éducation ou du social. « Quelle suite sera donnée à la demande d’alignement de l’indemnité de résidence avec celle accordée dans le Genevois français, afin de mieux prendre en compte le coût du logement chez nous ? »
En 2022, sur les 224 000 frontaliers travaillant au Luxembourg, près de la moitié résidaient en France. Aujourd’hui, les travailleurs frontaliers contribuent à près de la moitié du budget luxembourgeois par leurs impôts et leurs charges tout en bénéficiant très peu des services publics du pays. Inversement, dans les territoires où résident et vivent ces travailleurs, où ils utilisent les différents services publics, aucune contribution n'est perçue par les collectivités locales. « Ce phénomène accroit les écarts de richesses et de développement entre le territoire luxembourgeois et le territoire frontalier français. On ne peut se satisfaire de cette situation d’injustice en plein cœur de l’Europe, a complété le vice-président délégué à l’Aménagement, André Corzani. Le modèle de développement, basé sur une relation totalement déséquilibrée avec le Luxembourg, a fait long feu. Les collectivités du versant français, au vu de leurs capacités financières, ne jouent pas à armes égales quand il s’agit de cofinancer des projets avec le Luxembourg. Il nous appartient maintenant de trouver d’autres leviers pour atteindre un développement du Nord Lorrain plus harmonieux. Ces leviers existent, les accords de compensation étant la norme entre la France et ses voisins : impôts des travailleurs frontaliers en Allemagne, travailleurs dans 8 cantons suisses à hauteur de 4,5% de la masse salariale. Pour quelle raison cela serait-il impossible entre le Luxembourg et la France ? »
Et Vincent Hamen, vice-président délégué au Transfrontalier et à la Coopération décentralisée, de conclure : « La question qui se pose maintenant, Madame le Préfet, est la suivante : où allons-nous ? La dernière Conférence intergouvernementale s’est tenue en avril 2023.Comment penser que ce format puisse être satisfaisant pour traiter de déséquilibres territoriaux qui érodent insidieusement la cohésion locale ? Comment une instance qui ne semble pouvoir se réunir de manière régulière pourrait-elle répondre à ces enjeux du quotidien qui sont, qui plus est, en constante évolution et auxquels la nécessité d’apporter des réponses se fait de plus en plus pressante ? Nous ne pouvons pas nous satisfaire de cet immobilisme. La gouvernance autour des enjeux transfrontaliers mérite une refondation. »